PARTIE 1 : CONTEXTE DE MARCHE
Introduction
Acteur historique de la grande distribution fondé à Saint-Etienne, Casino nait bien avant ses concurrents Carrefour ou Auchan dès la fin du XIXème siècle en 1898. L’histoire récente du groupe se confond avec le parcours de son PDG Jean Charles Naouri qui dirige celui-ci depuis 1997. Les premières années ont été prometteuses avec de fortes ambitions internationales qui ont été marquées par un développement rapide et réussi en Amérique du sud.
La suite a été beaucoup plus pénible. Plombé par sa dette, le groupe et son PDG tentent de s’en sortir depuis 2015. Le vaste plan de cessions qui vise ni plus ni moins à sauver le groupe est proche de toucher à sa fin alors que des mots de son PDG, « la redéfinition du mix produits du groupe est quasiment terminée ».
Suffisant pour repartir de l’avant ? Tentons de voir ça plus en détail avec une brève revue du groupe, de son histoire récente depuis la prise de fonction de JC Naouri et des ennuis auxquels Casino doit faire face depuis 2015.
I – Le groupe Casino aujourd’hui
Avec des ventes à plus de 30 Milliards en 2021, le groupe Casino est un acteur majeur de la distribution Française. Il est toutefois bien loin des leaders que sont Carrefour et Leclerc qui détiennent à eux deux plus de 40% du marché Français.
La dynamique n’est toutefois pas à l’avantage de Casino qui a vu ses parts de marché considérablement s’effriter en 10 ans sur le territoire Français. Les parts de marché du groupe ont ainsi été divisé quasiment par deux sur la période. De même, Carrefour, longtemps leader est désormais relégué au rang de challenger par Leclerc.
Les ventes en France étaient encore majoritaires pour le groupe il y a quelques années mais ce n’est plus le cas. L’Amérique Latine est désormais le premier marché avec une vraie dynamique de croissance alors que l’activité en France ne fait que décroitre de longue date.
Niveau activité, le groupe est très diversifié : Il y a les hypermarchés et supermarchés Géant, des magasins de proximité Petit Casino, Monoprix, des magasins Bio Naturalia, le site Cdiscount, GreenYellow …
Note : L’image ci-dessous présente l’implantation du groupe dans le monde mais elle est antérieure à la cession de certaines enseignes et au retrait du groupe de certains pays en Afrique notamment)
Un mot sur l’actionnariat pour finir : il se compose majoritaire de Rallye à 52% et de flottant à 36%. A noter également que l’homme d’affaire Tchèque Daniel Kretinsky est monté en début d’année au-dessus des 10% via sa holding Vesa.
II - Prise de contrôle par Jean Charles Naouri
Pour comprendre l’histoire récente du groupe Casino, il faut parler de celle de son PDG, Jean Charles Naouri car celles-ci sont étroitement liées depuis sa prise en main du groupe il y a de cela 25 ans.
JC Naouri rachète d’abord les supermarchés Rallye. Il monte ensuite en puissance au sein du groupe Casino avant de réussir à prendre le contrôle du groupe Stéphanois en 1997 après une bataille boursière contre le groupe Promodès.
Cette prise de contrôle a notamment été possible grâce à « une cascade de holdings avec de la dette à tous les étages ».
Au fil des ans, les acquisitions se multiplient avec les acquisitions de Franprix, de Leader Price, puis de Monoprix. En 2012, nouveau gros coup pour JC Naouri qui prend le contrôle du groupe Pao de Açucar, premier distributeur Brésilien avec plus de 20 milliards d’euros de chiffre d’affaires.
Casino encre ainsi fortement son activité sur le continent sud-Américain, avec des ventes au Brésil qui tutoient la moitié des ventes globales du groupe avec en outre des perspectives très alléchantes : "La croissance était de 10% avec une rentabilité opérationnelle de 7 à 8%"
Toutes ces acquisitions au fil des années se sont faites au prix d’une dette grandissante. L’architecture financière de JC Naouri repose sur toute une série de holdings qui lui permettent de garder facilement le contrôle tout en répartissant la dette grandissante sur les différentes entités :
« Sa société mère, Euris, détient 92 % de la société Finatis, qui possède 90 % de la Foncière Euris, qui contrôle 59 % de Rallye qui conserve 51 % du groupe Casino. »
« Il a longtemps donné l’impression d’être un virtuose. Mais les fragilités de son modèle se sont progressivement révélées », constate un spécialiste du secteur.
III – Le début des ennuis
Jusqu’au milieu des années 2010, tout allait bien. La multiplication des acquisitions dynamisait la croissance du groupe tandis que les différentes holdings jouaient parfaitement leur rôle pour répartir la dette grandissante.
Oui mais voilà, deux événements aux conséquences catastrophiques vont se produire. Dans un premier temps, une baisse du cours de l’action vient fragiliser l’édifice de JC Naouri. Puis une attaque de VAD de Muddy Waters qui est venu encore accentuer cette chute des cours et dévoiler au grand jour la précarité de la situation.
Détérioration de l’activité et endettement devenu élevé ont provoqué une chute du cours de près de 50% entre mi 2014 et fin 2015.
Cette baisse des cours a directement affecté le groupe : Avec cette baisse des cours, les actifs de Rallye (essentiellement des actions Casino), valaient désormais moins que sa dette. Or une bonne partie des prêts sont gagés sur des actions Casino, fragilisant considérablement l’édifice.
Ce montage via de nombreuses holdings n’est pas unique. Vincent Bolloré ou Bernard Arnault ont bâti leur succès sur ce format. Mais « Naouri n’a pas simplifié la structure de son groupe quand son cours de Bourse le lui permettait. »
Fin 2015, la situation devient explosive puisque Casino est directement attaqué par le fonds activiste Muddy Waters qui publie un rapport à charge sur le groupe, en expliquant pourquoi il vend à découvert d’action Casino. Pour Muddy Waters, l’action Casino ne vaut pas plus de 6.91€ contre un cours de 48.97€ ! L’action dévisse de 20% mais malgré cela, elle se tiendra plutôt bien dans les mois et années suivantes, évoluant entre 40€ et 55€. C’est en revanche le début d’une longue bataille.
Pour Muddy Waters « Casino était en train d’être vidé de sa substance afin de supporter le fardeau de dette insoutenable des holdings situées au-dessus de lui ». Casino porte de son côté plainte pour manipulation de cours en 2018 « Rallye et Casino subissent, depuis plusieurs mois, de violentes attaques et des campagnes de désinformation orchestrées notamment par des fonds spéculatifs dans le but de faire chuter artificiellement la valeur de leurs titres et de déstabiliser les entreprises, leurs salariés et actionnaires ».
Mais force est de constater avec le recul que Muddy Waters était dans le vrai. Mais en jouant un rôle actif dans l’affaire, il a directement contribué à amplifier la chute du cours de l’action Casino. Or c’est bien la chute du cours qui avait été l’élément déclencheur des ennuis de Casino.
La pyramide de dette a finalement contraint Jean-Charles Naouri à demander le placement en procédure de sauvegarde des sociétés qui contrôlent le groupe Casino en 2018.
Cette dette justement, est montée à plus de 7 milliards d'euros en 2018.
Casino est ainsi complétement pris au piège par les difficultés de son principal actionnaire Jean-Charles Naouri et de sa société RALLYE (premier actionnaire de CASINO). « Un revers de taille pour celui qui a bâti son empire dans la grande distribution au prix de montages financiers complexes aujourd’hui devenu son fardeau. »
« Il faut comprendre que le choix de la mise en redressement judiciaire, permettrait en premier de faire supporter la dette aux seules holdings en protégeant l’activité courante du Groupe Casino. »
Cette procédure, c’est un moyen de gagner du temps face à ses créanciers. JC Naouri n’en est pas du tout à céder le contrôle de Rallye. « Rééchelonner la dette sur une durée de 10 ans est le plus pertinent ».
Celle-ci est d’ailleurs plutôt un succès : les holdings de JC Naouri ont réussi à renégocier 3.29 Milliards de dettes. Le plan négocié prévoit un remboursement des créances bancaires à 85% au bout de 3 ans. L’échelonnement de la dette obligataire sur 10 ans avec un paiement de 65% de la créance la dernière année. L’homme d’affaire Daniel Kretinsky déjà présent au capital de Casino ajoute une ligne de financement de 233 millions.
Pour pouvoir être en mesure de procéder à ce remboursement, Casino va devoir se lancer dans une vaste cession d’actifs.
La suite du parcours boursier de l’action tourne toutefois au calvaire pour le groupe malgré deux puissants rebonds en 2019 au gré des annonces de cessions. Casino a perdu 80% de sa valeur entre fin 2019 et fin 2022.
Casino reste en effet une cible de choix pour la VAD. En 2018, pas moins de 18 fonds vautours ramassent près de 18,5% du capital. Devant les ennuis du groupe, la VAD ne lâchera jamais l’affaire faisant de Casino encore aujourd’hui l’une des actions les plus shortée de la cote Française. Les investisseurs eux, sont de plus en plus nombreux à fuir l’action.
Malgré ces ennuis et cette débâcle boursière, JC Naouri tente de se sortir du pétrin dans lequel il s’est englué. Le succès de la procédure de sauvegarde de Rallye lui a donné du temps. Du temps pour désendetter le groupe via un gigantesque plan de cession d’actifs.
IV - Plan de cession d’actifs
Il dévoile en effet rapidement un plan de cession d'actifs non stratégiques en France d'un montant de 4,5 milliards d'euros qui est lancé en juillet 2018.
Avec ce plan, Casino se réoriente rapidement et va « concentrer son développement sur les segments porteurs, adaptés aux mutations du marché : l'e-commerce, le premium et la proximité, les géographies porteuses (Brésil et Amérique latine) ».
En 2022, le plan de cession a considérablement bien avancé. Le groupe a vendu pour 4.0 milliards d'euros d'actifs parmi lesquels une bonne partie de son immobilier, sa participation dans Mercialys, ses magasins Discount et une bonne partie de sa participation dans GreenYellow.
Casino s’est également débarrassé de l’encombrante enseigne Go Sport pour un euro symbolique.
Ce plan n’est toutefois pas assez efficace : A fin 2021, la dette nette ressortait à 5,86 milliards d'euros, en hausse de 26,4% sur un an. Casino annonce ainsi vouloir accélérer l’exécution de son plan, promettant également 1,3 milliard d'euros de cessions supplémentaires au plus tard avant la fin de l’année 2023.
Notons également qu’une bonne majorité des actifs cédés n’étaient pas considérés comme stratégiques par le groupe. La cession d’une partie du capital de GreenYellow change ce cap. En effet, GreenYellow est considéré comme la deuxième pépite du groupe Casino avec Cdiscount. L’explication c’est que Casino est sous pression et que sa cession d’actifs ressemble de plus en plus à une course contre la montre.
Fondée en 2007 au sein du Groupe Casino, GreenYellow a réalisé un CA de 352 M€ en 2020 avec un Ebitda de 90 millions d’euros. Elle ambitionnait un CA de plus de 500 M€ pour 2021. Casino cède une partie de sa participation pour 600 millions d’euros sur une base de valeur d’entreprise de 1.4 Milliard d’euros.
Spécialiste des petites installations solaires sur les toitures des supermarchés, des entrepôts et des bâtiments des collectivités locales, GreenYellow reste peu connue du grand public.
V - Quel Avenir ?
Au niveau des résultats, force est de constater que la situation ne s’améliore pas vraiment, ceux-ci restant fermement encrés dans le négatif : Le groupe enregistre une perte de 530 millions en 2021 contre 890 millions en 2020.
De l’autre, Casino continue sa mue, avec de l’aveu de JC Naouri, « une redéfinition du mix du groupe quasiment terminée » début 2022.
Place désormais à la conquête. Pour ce faire, le groupe Casino peut s’appuyer sur ses relais de croissance : la proximité, le e-commerce alimentaire et non-alimentaire, le digital et l’énergie. Comme l’explique le dirigeant, « les formats de Casino en France sont presque tous rentables et pour la plupart très porteurs ».
Cette stratégie offensive s’accompagne de nombreux changements.
L'enseigne Géant Casino va disparaître d'ici la fin du premier trimestre 2023 : Le groupe va remplacer l'ensemble des enseignes de ses hypermarchés "Géant Casino" par une nouvelle enseigne, "Casino #Hyper frais"
Casino a également été l’un des pionniers de la formule d’abonnement lancée en 2019 avec Casino Max. Devant le succès de cette formule (le consommateur bénéficie de -10% sur pratiquement tout le magasin hors carburant pour 10€ par mois ou 90€ par ans), Casino a décidé de la déployer à ses différences enseignes. Le modèle économique rentable participe largement à la fidélisation des consommateurs dans un environnement hyperconcurrentiel avec déjà 250 000 abonnés en aout 2022.
Casino tente dans le même temps de s’adapter aux tendances de marché : face à l'essoufflement des hypermarchés, Casino réoriente 20 magasins (sur 81) vers l'alimentaire.
"Il y a 15 ans, l'hypermarché était le temple de la consommation, avec tout sous le même toit. Aujourd'hui, ce n'est plus le cas", constate Tina Schuler, directrice générale de Casino Supermarchés.
Selon les chiffres de l'institut IRI, le non-alimentaire a d'ailleurs perdu en France un milliard d'euros de chiffre d'affaires en GSA (Grandes Surfaces Alimentaires) entre 2016 et 2021.
Mais le temps presse … Car côté bilan, il n’y a pas non plus d’amélioration significative : la dette nette de Casino n’a pas rassuré les investisseurs. Elle est passée de 6,3 à 7,5 milliards d’euros sur un an (2022).
Casino ne s’en sort tout simplement pas malgré la multiplication des cessions.
La qualité de la stratégie déployée par JC Naouri devra rapidement porter ses fruits. La multiplication des cessions n’a pas permis de désendetter le groupe (ou trop peu). Le potentiel de cessions a été largement épuisé. Le groupe doit maintenant compter sur un rapide retour à la rentabilité pour voir le bout du tunnel.
Mais l’inflation persistante dans un secteur aux marges étriquées pourrait venir contrarier cette stratégie et potentiellement retarder la transformation réussie du groupe. Pas une bonne nouvelle alors que le temps presse et que la dette du groupe, son problème majeur, est toujours très loin d’être réglé.
PARTIE 2 : EXERCICE DE VALORISATION
Cet exercice de valorisation se composera de plusieurs parties qui viseront à étudier et noter chaque composante du business. La note finale impactera 3 types de valorisation : Base, croissance et sectorielle, qui ensemble donneront une JUSTE VALORISATION du titre.
SOMMAIRE :
1 Ratios de valorisation
2 Dynamique et bilan
3 Macro
4 Environnement internet et externe
5 Management
6 Catalyseurs & Historique
7 Valorisation sectorielle
RATIOS DE VALORISATION
Avec plus de 5.5 Milliards de capitaux propres, ceux-ci sont de très loin supérieurs à la capitalisation boursière du groupe (909 ME). Le groupe n’ayant pas dégagé de profits depuis plusieurs années, le PER n’est ici pas pertinent. Au niveau des multiples sectoriels, la majorité des acteurs Européens du secteur de la grande distribution ont une capitalisation boursière comprise entre 10 et 30% de leur chiffre d’affaires (14.4% pour Carrefour). Pour Casino, on est sous les 3%.
DYNAMIQUE ET BILAN
2021 a marqué la quatrième année consécutive de chute du chiffre d’affaires. Les pertes se sont toutefois réduites en 2021 tout en restant élevées (-530 vs -886 ME).
Après des années de chute du chiffre d’affaires au gré des cessions non stratégiques, le chiffre d’affaires est attendu en nette hausse pour 2022 avec un premier semestre qui a démontré une certaine dynamique.
La croissance à 5 ans apparait comme tout à fait correcte grâce à : La dynamique de la région n°1 des ventes (Amérique du Sud) ; Cdiscount et le e-commerce ; la réorientation stratégique vers les magasins de proximité aux dépens des Hyper. La croissance sectorielle elle, est relativement médiocre.
Au niveau du bilan, les dettes dépassent assez largement les capitaux propres. Celles-ci sont en revanche assez faible par rapport au CA (environ 25%). Certains des éléments listés plus haut donnent une certaine visibilité à l’activité mais ceci est largement contrebalancé par le contexte inflationniste persistent et les possibles cessions supplémentaires que le groupe pourrait être contraint à faire. Enfin pour ce qui est du taux de marge, pas vraiment besoin d’explication supplémentaires sur la note négative vu que le groupe n’a pas fait de bénéfices depuis 2017 … La marge d’Ebidta est toutefois en constante amélioration depuis 2019 (2019 : 8.3% ; 2020 : 8.8% ; 2021 : 9.1%)
MACRO
Casino subit comme une majorité d’entreprises le contexte défavorable même si la grande distribution est moins affectée que d’autres secteurs. En revanche, une forte inflation rend la tâche pas toujours évidente aux distributeurs pour répercuter la hausse des prix dans un secteur hyperconcurrentiel où les marges sont très faibles.
ENVIRONNEMENT INTERNE ET EXTERNE
C’est malheureusement une constante depuis de longues années, Casino figure dans le palmarès des actions Françaises les plus shortées. C’est l’une des poules aux œufs d’or des vendeurs à découvert et ce n’est, semble-t-il, pas près de changer …
MANAGEMENT
Les attaques directes de VAD contre le groupe, la procédure de sauvegarde de Rallye ont largement contribuer à fragiliser le groupe et à son instabilité. Pas de crise ouverte de gouvernance, la déroute boursière impactant majoritairement JC Naouri l’actionnaire principal (à plus de 50%) et les petits porteurs (36% de flottant). La stratégie de cessions a été à mon sens très cohérente jusque-là mais elle se fait de plus en plus sous contrainte (GreenYellow par exemple). Pour ce qui est de la communication, la société est plutôt transparente sur l’exécution de son plan de cession en listant précisément les cessions et leur montant tout en expliquant assez clairement ses orientations stratégiques (Amérique Latine, e-commerce, proximité).
CATALYSEURS + HISTORIQUE
Le respect de l’exécution du plan de cession et la trop faible réduction de la dette jusqu’ici pourrait amener le groupe à procéder à d’autres cessions. C’est une course contre la montre qui se joue pour la réduction de la dette et les échéances auprès des créanciers. Aussi, des cessions d’actifs plus stratégiques (comme ce fut le cas pour GreenYellow) pourrait fortement dynamiser le cours à court terme. Les ventes retrouvent un certain dynamisme en 2022 mais il n’y pas pour autant de hausse d’objectifs. Les yeux sont de toute façon davantage rivés sur la dette. Pour ce qui est de l’historique du cours, c’est malheureusement catastrophique : le cours était à 100€ en 2014 …
NOTE FINALE
VALORISATION SECTORIELLE
La valorisation sectorielle des grands acteurs Européens cotés de la grande distribution fait ressortir quelques différences notables. Carrefour se paye actuellement 0.14x son chiffre d’affaires. Pour le Belge Colruyt, ce chiffre est presque doublé avec une capitalisation qui représente 28% des ventes. Pour les Britanniques Tesco et Sainsbury, ce chiffre est respectivement de 0.24x et 0.12x le chiffre d’affaires.
Dans une approche plutôt prudente, je me baserai un multiple un peu en dessous de celui de Carrefour et proche de celui de Sainsbury à 0.12x le chiffre d’affaires. Sur cette base (et en incluant un malus de 5% ; voir plus bas), la valorisation sectorielle ressort à 33.62€.
JUSTE VALORISATION
A l’issue de ce travail de valorisation intégrant la dynamique du groupe, sa santé financière, ses perspectives de croissance et l’étude de ses comparables ; le calcul fait ressortir une juste valorisation du titre à 15.04€. Soit un potentiel de 79.4% lors de l’analyse (8.385€).
CONCLUSION
La valorisation tirée de ce modèle apparait comme attractive avec un upside de près de 80%. La valorisation réelle de seulement 900 millions ne semble pas du tout refléter de façon adéquate la valeur réelle des actifs du groupe à commencer par Cdiscount (détenu via Cnova), GreenYellow ou encore les distributeurs Sud-Américains.
Le plan de cession a permis au groupe d’accélérer sa transformation en se recentrant sur ses actifs les plus stratégiques, leviers de croissances pour le futur. Ce recentrage s’est aussi opéré au niveau de la définition du mix du groupe, qui délaisse clairement les hypers et supermarchés pour se réaxer sur la proximité et sur le système par abonnements pour caper au mieux les tendances de marché. Le groupe apparait donc injustement valorisé et dans le même temps, très bien préparé pour la suite. Donc oui il y a du potentiel sur Casino c’est indéniable. Mais il y a un très gros MAIS.
Les ennuis du groupe et de son PDG qui ont été exposés au grand jour en 2018 sont loin d’être réglés. Pour se sortir du corner en 2018, JC Naouri a gagné du temps. Son plan de cession est cohérent, bien mené. Mais voilà, la dette, problème du groupe n’est pas du tout réglée. Elle a même augmenté en 2021 alors que tout l’intérêt du plan est de désendetter le groupe. Le cours a perdu plus de 35% depuis la publication de ses résultats fin juillet et le marché semble avoir perdu espoir sur le dossier.
Casino ne s’est donc d’une part pas (ou trop peu) désendetté, n’est toujours pas rentable au S1 2022 et commence à céder ses actifs les plus stratégiques avec GreenYellow. Difficile d’être optimiste même si encore une fois, je trouve que le plan de cession a été cohérent et que la stratégie à l’heure actuelle a tout pour fonctionner. En vérité ce plan arrive trop tard. Probablement 2 à 3 ans trop tard qui ont été perdus en laissant ce problème de la dette perdurer et en lançant ses forces vives contre la VAD.
Ce qui pourrait encore sauver le groupe c’est un retour à la rentabilité et une génération décente de cash-flow. Sans cette condition, difficile de ne pas imaginer le pire pour Casino …
OPINION > A l’ECART
Rappel : Ce travail n’est en aucun cas un conseil en investissement. Il vise simplement à produire une analyse d’une société cotée et tente de valoriser celle-ci au vu des éléments analysés.
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