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q.dyon

Ubisoft : dans les bras de la Chine ?


La déroute boursière d’Ubisoft (-90% depuis 2018) a fait une pause ce vendredi avec la publication en séance d’une news sur un éventuel rachat ou sortie de la cote d’Ubisoft par ses fondateurs associés au Chinois Tencent. Le bond du cours de +33.5% indique que la nouvelle est plutôt sérieuse. Une option confirmée par la clôture au plus haut de la séance qui semble de facto, exclure la thèse d’une simple rumeur ou d’un pétard mouillé. Et ce d’autant plus qu’Ubisoft n’a pas démenti la nouvelle.

S’ils sont les principaux responsables de la déroute boursière de leur titre, il y a également fort à parier que comme beaucoup d’actionnaires, les Guillemot se sont lassés de voir la valeur de leur action dégringoler. Jeudi, leur participation valait moins de 300 ME contre plus de 3 Milliards en 2018. Les premiers pénalisés par l’exécution désastreuse d’Ubisoft ces dernières années ce sont eux.


Tencent en revanche, joue de son côté une partition au long cours. Les Chinois sont patients. La famille Guillemot s’était précipitée dans leurs bras en 2022 pour sécuriser leur position et éviter d’être chassée par d’autres prédateurs. Tencent avait largement surpayé son ticket d’entrée dans la holding des Guillemot, avec une valeur d’action Ubisoft à 80€, mais Tencent avait bien réussi son abordage. Il était stipulé dans ce pacte que le géant Chinois ne pourrait pas augmenter sa participation de 9.99% dans Ubisoft avant 8 ans. Sauf si les choses déraillaient avant cela.


Et justement, les ratés sur les grosses sorties d’Ubisoft ces 12 derniers mois sont clairement en train de faire dérailler le train. Car Ubisoft comptait beaucoup sur les sorties de leurs jeux Avatar, Star Wars et du nouvel Assassin’s Creed au Japon pour redresser la barre. Il n’en fut rien, entre flop passés (Star Wars) et à venir (Assassin’s Creed qui n’était clairement pas prêt à sortir et dont la sortie a été repoussée), Ubisoft n’a pas saisi la belle occasion qui se présentait d’enclencher une nouvelle dynamique. Encore pire, l’éditeur en ressort considérablement fragilisé.

Tencent, de son côté, dispose d’une puissance de frappe colossale, sa capitalisation boursière est de 520 milliards d’euros, soit 260x celle d’Ubisoft qui est sous les 2 milliards. Le groupe Chinois qui avait placé ses pions, n’avait plus qu’à attendre. Et les Guillemot ont appelé au secours beaucoup plus vite que Tencent ne l’espérait, acculés par les ratés de leurs jeux phares et par une pression constante sur le cours de bourse des fonds de vendeurs à découvert (Ubisoft est la 4ème action la plus shortée sur la cote Parisienne). Admirons quand même l’ironie si les hedge funds Américains précipitent une entreprise qui vends majoritairement en Amérique du Nord (55% du CA d’Ubisoft) dans les bras des Chinois.

La décision est dans les mains des Guillemot désormais. Tencent n’aura aucun mal et sera sans aucun doute prêt à débourser n’importe quelle somme pour sortir Ubisoft de la cote à leur côtés, Ubisoft étant un nain insignifiant comparé au géant Tencent. Que seraient 5 milliards pour un Tencent qui en pèse plus de 500 ? Si les Guillemot donnent le feu vert, Tencent suivra. Le seul potentiel frein finalement et c’est plutôt contrintuitif, serait une remontée trop forte du cours de bourse. C’est la déroute du cours de bourse qui a précipité les Guillemot à envisager cette option, or une remontée trop rapide et trop violente pourrait leur donner ce qu’ils souhaitent sans avoir à donner plus de contrôle à Tencent. Car si les Guillemot sortent de la cote Ubisoft avec Tencent, ce ne sera pas sans contrepartie puisque les Chinois verraient forcément leur participation renforcée.


Même si Ubisoft est infiniment petit comparé à Tencent, il n’en serait pas moins une cible de choix. Car Ubisoft, même si on l’a un peu oublié à cause d’une exécution catastrophique, ce sont des licences exceptionnelles et un savoir-faire unique et reconnu.


Dernièrement, le marché ne voyait plus que les (nombreux) ratés d’exécution et ne valorisait plus du tout la valeur des actifs et du savoir-faire uniques dont disposait Ubisoft. Même avec le +33% de vendredi, Ubisoft a une capitalisation de 1.8 Milliards d’euros. Est-ce que la licence phare Assassin’s Creed ne vaudrait-elle que 1 ou 1.5 milliard ? On peut avoir un élément de réponse en regardant du côté de la concurrence. Ubisoft est actuellement valorisé un peu moins d’une fois son CA. Un acteur majeur comme Take Two, qui produit la licence phare GTA est valorisé environ 5x son CA et ce alors que Take Two a publié une perte de 3.5 Mds USD sur son exercice écoulé et qu’il devrait être encore en perte cette année.


Cette opération sur Ubisoft si elle venait à se concrétiser, pourrait finalement intervenir alors que plus grand monde ne l’attendait. Ubisoft a eu pendant très longtemps une valorisation très élevée, beaucoup trop en fait (merci Vincent Bolloré). En verrouillant leur capital avec le Chinois Tencent, les Guillemot ont détruit cette prime spéculative qui avait soutenu le cours de bourse à un cours anormalement élevé. Et ce alors même que l’action Ubisoft était déjà en déroute. Les ratés d’exécutions ont ensuite parachevé ce cocktail explosif, mettant la famille Guillemot aux abois. Tencent, qui lorgne sur Ubisoft depuis longtemps, ne pensait certainement pas avoir cette opportunité aussi tôt. Il est peu probable qu’ils laissent passer une opportunité qui à défaut de leur donner le contrôle, le renforcerait significativement.

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